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La promotion des investissements privés en droit togolais

Afrique - Droits nationaux
05/03/2019
L’investissement est, depuis longtemps, considéré comme l’un des principaux vecteurs du développement durable des États en voie de développement. Conscient de cette situation, les États africains s’activent constamment à créer un cadre juridique propice pour attirer et accroître les flux des investissements internationaux. Les explications de Komlanvi Agbam, doctorant en droit des affaires internationales, Université de Nantes et Mawaba Addi, diplômé du M2, Juriste d’affaires internationales, Université de Dijon, juriste stagiaire à Natixis Lease (service montage et ingénierie).
C’est en ce sens que le Togo, conscient de l’obsolescence de son Code des investissements du 30 septembre 1989, vieux de plus de 23 ans, devenu inadapté aux réalités économiques actuelles et moins attractifs, a adopté le 20 janvier 2012, un nouveau Code des investissements. Ce Code a été adopté avec l’objectif de promotion, de facilitation et de protection de l’investissement durable et responsable au Togo. Le but est de favoriser la création d’emplois pérennes et qualifiés, de favoriser la création d’activité à forte valeur ajoutée, d’encourager l’utilisation et la valorisation des ressources naturelles et des matières premières locales, de développer l’économie de l’immatérielle en encourageant le transfert de compétence et l’utilisation de nouvelles technologies…
 
S’il est vrai que la notion d’investissement n’a pas de définition unanime, les textes contemporains en la matière se donnent à cet exercice difficile qui est de définir le terme « investissement ».
 
Le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux Investissements (CIRDI) en donne une définition par le relèvement des critères qui permettent de le saisir. Il s’agit de la durée, de l’apport, du risque et du développement de l’État hôte [1].
 
L’investissement peut être défini comme un apport de moyen financier, matériel et/ou humains à une activité dans le but d’en tirer un revenu futur. L’investissement peut être international (étranger) ou national. Il peut aussi être direct ou indirect.
 
L’investissement est international lorsqu’il est réalisé par un opérateur économique qui n’est pas ressortissant de l’État sur le territoire duquel il est réalisé son apport. Lorsque l’opérateur économique est ressortissant de l’État du territoire d’accueil, l’investissement devient national.
 
L’investissement est direct lorsque l’investisseur acquiert un intérêt durable dans une entreprise dans le but d’avoir un pouvoir de décision effectif dans la gestion de l’entreprise (seuil fixé à 10 % du capital). Dans les autres cas, l’investissement devient indirect ou de portefeuille.
 
Le nouveau Code togolais des investissements (« le Code ») semble se conformer à la règle et définit l’investissement en son chapitre 1er, ce qui permet de délimiter précisément l’application du Code et d’éviter des problèmes de qualification en cas de survenance des litiges.
 
En effet, l’article 2 du Code des investissements togolais défini la notion d’investissement comme étant un ensemble de « capitaux mobilisés par toute entreprise pour l’acquisition des biens mobiliers, immobiliers, matériels et immatériels et pour assurer le financement des frais de premier établissement ainsi que les besoins en fonds de roulement rendus nécessaires à l’occasion de la création d’entreprise nouvelle ou dans le cadre d’un programme d’extension d’entreprise ». On peut déjà s’interroger sur cette définition.
 
En effet, il ressort des dispositions liminaires de l’article 2 précité, que la notion d’investissement suppose la mobilisation d’un ensemble de capitaux par « toute entreprise ». Le texte ne vise que « les entreprises », définies comme « toute unité de production, de transformation et/ou de distribution de biens ou de services, à but lucratifs légalement constituée en société sous une forme reconnue par l’AUDCG/GIE de l’OHADA ou sous forme de société coopérative ». Est-ce à dire que le législateur togolais exclut les personnes physiques de la notion d’investissement puisque le texte ne vise que « les entreprises » entendues comme des personnes morales et non des personnes physiques ?
 
La réponse semble être négative, dans la mesure où le même article défini in fine l’investisseur comme étant « toute personne physique ou morale togolaise ou étrangère réalisant un investissement sur le territoire national ».
 
C’est pour éviter cette ambiguïté nous semble-t-il, que la plupart des États d’Afrique subsaharienne définissent dans leur Code des investissements la notion « d’investissement » comme étant un ensemble de capitaux employés par toute « personne physique ou morale (…) »[2]. Il est donc préférable d’avoir une définition qui inclut directement la notion de personne physique et morale afin d’éviter toute ambiguïté.
 
La question fondamentale qui résulte de cette étude est celle de savoir si le nouveau Code togolais des investissements est réellement incitatif aux investissements étrangers.
 
Sans doute, la mise en place du nouveau Code togolais crée un cadre juridique attrayant aux investissements tout en alliant le développement du pays d’accueil. Le rapport Doing business 2019 du classement de Banque mondiale sur l’environnement des affaires publié ce 31 octobre 2018 montre que le Togo avance considérablement en matière d’attractivité des Investissements directs étrangers (IDE). Le Togo gagne 19 places par rapport à l’année précédente grâce à ses réformes en matière d’investissements et se classe dans le top 10 mondial des pays réformateurs.
 
Bien que ce nouveau cadre théorique soit bien incitatif et que le cadre pratique demeure innovant, il ne faut pas perdre de vue qu’il y a encore des efforts considérables à faire.
 
Un cadre théorique incitatif : l’institution d’un nouveau Code togolais des investissements
Le nouveau Code togolais des investissements issu de la loi n° 2012-001 du 20 janvier 2012 comporte non seulement des mesures incitatives aux investissements privés . Il est également émaillé des grands principes internationaux du droit des investissements .
 
La présence des grands principes internationaux du droit des investissements. – Il découle du principe de souveraineté que les États sont compétents pour réglementer les investissements internationaux sur leurs territoires. Toutefois, La multiplication des traités bilatéraux de promotion et de protection des investissements (TBI) a laissé apparaître bon nombre de règles standards visant la protection des investisseurs dans l’État d’accueil.
 
Qu’ils soient de sources nationales, régionales ou internationales, on retrouve dans les textes relatifs aux investissements, des principes directeurs qui viennent poser les droits et devoirs de chacun des acteurs tant du côté de l’État d’accueil que de celui des investisseurs[3]. On y retrouve généralement des règles relatives au champ d’application, aux principes de protection des investisseurs ou encore des règles concernant le règlement des différends, qui ont tous pour rôle essentiel de rassurer l’investisseur.
 
Ayant pris conscience que les dispositions concernant la protection des investisseurs sont un vecteur important pour rendre le pays attractif, le législateur togolais ne s’est pas limité aux protections qui existaient dans l’ancien code.
 
En effet, en plus du droit au libre transfert des capitaux et de la liberté de gestion, le nouveau Code rajoute au chapitre II, des principes reconnus aujourd’hui comme primordiaux sur la scène internationale en matière d’investissement. Il s’agit du principe d’égalité de traitement ou de non-discrimination. Ce principe est l’un des plus importants que le doit international accorde aux investissements internationaux. Les investisseurs étrangers reçoivent un traitement identique à celui des personnes physiques ou morales togolaises ainsi qu’au traitement prévu au profit d’opérateurs étrangers ressortissants d’autres pays.
 
Le standard de pleine et entière protection et sécurité se retrouve à l’article 7 du nouveau Code, cette garantie de protection couvre la propriété privée de l’investisseur et s’étend même à tous ses aspects juridiques et commerciaux. Il faut noter à ce sujet qu’une jurisprudence abondante et constante consacre ce standard comme une obligation de moyen pesant sur l’État à l’égard de l’investisseur (T. ad hoc, 1er mai 1925, Affaire des biens britanniques au Maroc espagnol (Espagne c/Royaume-Uni) : RSA, vol II, spéc. p. 707), toutefois il reste malgré tout nécessaire que l’État ne descende pas en dessous d’un standard internationalement acceptable (T. CIRDI, 28 juill. 2009, aff. n° ARB/07/21, Pantechniki S.A. Contractors & Engineers (Grèce) c/Albanie, spéc. § 77-81).
 
La majorité des textes contemporains relatifs aux investissements contiennent une disposition relative à la protection de l’investisseur étranger contre une expropriation mise en œuvre par l’État d’accueil. Le législateur togolais là aussi s’est mis à jour en insérant dans le nouveau code des investissements une garantie de l’investisseur contre toutes mesures d’expropriation ou de nationalisation sauf cause d’utilité publique sous réserve d’une juste et préalable indemnisation. Il demeure important de préciser que le droit international général n’a jamais interdit à un État d’exproprier les investisseurs étrangers sous réserve de la réunion de certaines conditions (utilité publique de la mesure, mesure prise conformément à la loi, non discriminatoire, non contraire à un engagement particulier, et moyennant compensation).[4]
 
Le déséquilibre de pouvoirs qui existe entre l’État et l’investisseur privé constitue sans doute un frein aux investissements, l’investisseur pourrait se sentir en position de faiblesse en cas de survenance d’un litige ; il est dès lors primordial d’inclure dans les textes des règles encadrant la phase contentieuse qui peut surgir en cours de vie de l’investissement.
 
En droit togolais, en plus des recours classiques qui existaient tel que le règlement amiable, la saisine du CIRDI (Centre International pour le Règlement des Différends relatifs aux Investissements), d’autres voies de recours sont désormais possibles. Il est en effet possible de soumettre le litige à la Cour d’Arbitrage du Togo (CATO), à la Cour de justice de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), à la Cour de justice de la Communauté Economique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), ou encore à la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) de l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires. La possibilité d’avoir recours à l’arbitrage international est une donnée très importante étant donné qu’en matière d'opérations transnationales d'investissements, l'arbitrage opposant directement l'investisseur à l'État hôte constitue le mode de règlement privilégié (JCI Droit international, Fasc. 572-50).
 
Outre la présence des grands principes du droit international des investissements, le nouveau code des investissements togolais a aussi prévu des mesures spécifiques octroyant des avantages aux investisseurs durant toute la période de l’exploitation.
 
L’institution de mesures incitatives aux investissements privés. – Les mesures incitatives aux investissements permettent aux États de donner un élan à la croissance économique et à l'emploi sur leurs territoires ; mais elles ont aussi pour objectif d'attirer les investissements étrangers, de favoriser les transferts de technologie ou de diriger l'investissement vers certains secteurs clés ou certaines localisations.
 
En droit togolais, pour bénéficier des avantages du Code des investissements, il faut passer par le biais d’un des deux régimes mis en place ; celui de la déclaration ou de l’agrément.
 
Le régime de déclaration concerne les projets d’investissements supérieurs à 50 millions de FCFA (environs 76 225 euros) et inférieurs ou égaux à 600 millions de FCFA (soit environs (915 703 euros). À la suite d’une simple déclaration de l’investisseur et d’une remise d’un questionnaire dûment rempli et signé, il est délivré à celui-ci une attestation comportant la liste des avantages consentis dans un délai maximum de 8 jours.
 
Pour les porteurs des projets d’investissements d’un montant supérieur à plus de 600 millions d’euros (915 703 euros), ils doivent emprunter la voie de la procédure d’agrément pour bénéficier des avantages du code. L’agrément comportant les avantages accordés est délivré dans un délai de 30 jours, tout refus devant être notifié à l’investisseur énumérant de manière précise les motifs du rejet.
 
Plus concrètement durant la période d’installation ou de la réalisation du programme d’installation, des avantages douaniers sont instaurés. Il est prévu entre autres une exonération des droits de douanes sur certains équipements neufs importés dans le cadre de la réalisation de l’investissement et l’application d’un taux préférentiel de 5 % en ce qui concerne les matériels et équipements usagés.
On note aussi l’existence d’incitations fiscales notamment un abattement sur la base d’imposition au titre de l’impôt sur les sociétés, une réduction d’impôt sur les sociétés augmentant proportionnellement au nombre d’emplois permanents créés, une fixation de la taxe sur les salaires à un taux réduit de 2 %.
 
D’autres mesures particulièrement incitatives sont prévues pour les entreprises implantées dans certaines régions du territoire togolais dans un objectif clair de décentralisation. Ainsi, une réduction de 30 % sur la taxe foncière et sur la taxe professionnelle est accordée aux entreprises sur des durées allant de 3 à 9 ans en fonction de leurs zones d’implantation.
 
Un des objectifs du code est de promouvoir l’utilisation des matières premières locales. À cet effet une réduction de 30 % sur la taxe professionnelle sur les trois premières années est accordée aux entreprises valorisant uniquement les matières premières locales.
 
D’autres avantages sont également réservés aux entreprises régionales et internationales qui désirent construire leurs sièges administratifs au Togo, celles-ci ne paieront qu’un droit de douanes forfaitaire de 5 % ainsi qu’une exonération de TVA lors de leurs installations.
 
L’article 49 du Code des investissements va même jusqu’à permettre aux entreprises dont le programme d’investissement revêt un caractère particulier, de négocier avec l’État une convention particulière leur accordant des avantages dérogatoires ou complémentaires ainsi que des mesures d’accompagnements complémentaires. Les avantages accordés aux investisseurs par le biais de la déclaration ou l’agrément sont garantis puisqu’aucune disposition légale postérieure ne peut restreindre ou supprimer les avantages octroyés, tel qu’il ressort de l’article 54 du Code.
 
Rendre le climat des affaires plus favorable est important pour attirer les investisseurs dans un pays, mais cela doit aussi contribuer au développement de l’État d’accueil. C’est ainsi que pour s’assurer de l’octroi des avantages du Code, il y a une obligation de réserver la majorité des emplois permanents en priorité aux nationaux.
 
Pour l’administration du Code, il est prévu la création d’un organe spécial, l’Agence de la Promotion des Investissements et de la Zone Franche (API-ZF), ce qui constitue une révolution majeure par rapport à l’ancien code. Mais au-delà de ces avancées, le Code a-t-il pleinement rempli ses objectifs ?
 
Un cadre pratique innovant : La mise en place de l’Agence nationale de la promotion des investissements et de la zone franche – Le nouveau Code des investissements togolais précise en son article 10 qu’ « il est créé, pour l’administration du Code des investissements et du statut de la zone franche, une Agence nationale pour la Promotion des Investissements et de la zone franche ».
 
Le décret n° 2016-092 du 24 août 2016 constitue l’instrument juridique ayant permis l’opérationnalisation de l’Agence nationale pour la Promotion des Investissements et de la Zone Franche qui résulte du Code des investissements. Il fixe les attributions, l’organisation et le fonctionnement de l’API-ZF.
 
L’API-ZF, établissement public doté de la personnalité morale et d’une autonomie financière est venue remplacer[5] la SAZOF[6]et s’est dotée de plusieurs missions afin de faciliter l’investissement au Togo. C’est une belle avancée théorique qui nécessite une mise en œuvre pratique très efficace.
 
Une belle avancée pratique : Missions de l’API-ZF
La création de l’API-ZF constitue une belle avancée pour le Togo en matière d’investissement. L'intérêt principal de cette agence est de regrouper en une entité, une multitude de services à destination des entrepreneurs et des investisseurs (togolais et étrangers) afin de promouvoir l’investissement au Togo.
L’expérience de certains États africains montre que les Agences de promotion d’investissement (API) sont de véritables canaux d’augmentation des flux d’investissement direct étrangers (IDE).
 
En effet, le Centre de promotion des investissements en Côte d’ivoire (CEPICI) dès sa création a permis l’augmentation des flux d'investissements directs étrangers (IDE) de 30 % sur la période 2012-2015. Rappelons qu’avant la création du CEPICI les flux des IDE avaient accusé une baisse considérable de 17 % entre 2009 et 2012[7]. L’Agence nationale pour la promotion des investissements privés au Gabon dès sa création en 2018, a permis à plus de 900 personnes rien qu'au premier trimestre de créer leur entreprise dans des temps records et contribuer ainsi à leur manière à la diversification économique et à l'industrialisation du Gabon[8]. La Guinée est aujourd’hui classée parmi les 3 pays les plus réformateurs en Afrique subsaharienne selon le rapport Doing Business[9] 2019 grâce à ses réformes surtout minières et aux activités de son Agence pour la promotion des investissements (APPI).
 
L’API-ZF au Togo s’est dotée de plusieurs missions que nous pouvons regrouper en deux. Il s’agit des missions principales et des missions accessoires ou particulières.
 
Conformément à l’article 5 du décret de 2016 précité, l’API-ZF est habilitée, à titre principal, à exercer au Togo et à l’étranger des services publics liés à la promotion des investissements. À cet effet, l’API-ZF est chargée de la mise en œuvre du Code des investissements et du statut de la Zone Franche industrielle ainsi que les régimes économiques et les grands travaux spécifiques qui lui sont expressément confiés.
 
À titre accessoire, l’API-ZF exerce d’abord les fonctions de guichet unique pour l’ensemble des démarches administratives liées à l’implantation et à l’exploitation des sociétés situées sur le territoire togolais et relevant de l’un ou l’autre des régimes prévus par la loi du 20 juin 2012 portant Code des investissements au Togo et de la loi du 24 juin 2011 portant statut de la zone franche.
 
L’API-ZF a également pour missions particulières la délivrance et la gestion des agréments à l’investissement au Togo, l’administration du statut de la zone franche, le soutien à la formation et au transfert de compétence.
 
Ces différentes missions confiées à l’API-ZF s’inscrivent dans « la vaste réforme que le Togo a entreprise en vue de renforcer son dispositif d’appui au développement et à la promotion des exploitations » (Afi Afawoubo, directrice du Conditionnement et de la Métrologie légale du ministère du Commerce ; http://www.afreepress.info/index.php/nouvelles/economie/item/2949-togo-vers-la-creation-d-une-agence-de-promotion-des-exploitations-et-des-investissements). Ce n’est qu’à travers une bonne mise en œuvre pratique que la mission fondamentale confiée à l’API-ZF, celle de « promouvoir le secteur du commerce et des investissements pour booster l’économie » (Afi Afawoubo, précité) pourra être atteinte.
 
Nécessité d’une réelle effectivité de l’API-ZF : les pièges à éviter
La bonne mise en œuvre pratique des missions assignées à l’API-ZF permettra de booster sans doute les investissements nationaux et internationaux dans tous les secteurs d’activités au Togo. Ceci permettra in fine la création d’emplois et de richesses pour les populations ainsi que l'apport d’une plus grande visibilité aux acteurs économiques sur l'ensemble des démarches administratives, des obligations réglementaires et des opportunités d'investissement.
 
S’il est vrai que les agences de promotion des investissements (API) constituent en Afrique un puissant instrument de modernisation économique et d'accélération des investissements au service de l'industrialisation du continent, force est de constater que les API en Afrique, particulièrement dans la sphère francophone, semblent s’emmêler les pinceaux entre leur vocation principale, qui est de promouvoir leur pays auprès des investisseurs étrangers, et les « guichets uniques » qui se limitent au cadre strict de la création d'entreprises.
 
Plusieurs déclarations et des rapports rendus publics permettent de tirer la conclusion selon laquelle « les instances dirigeantes des API se penchent davantage sur les problématiques liées aux stratégies de simplification administrative pour la création d’entreprises, plutôt que de s’intéresser aux études de marché et de faisabilité pour faciliter l’accueil, l’orientation et l’encadrement des investisseurs »[10].

L’API-ZF Togo doit tirer des leçons de ce constat non négligeable et accorder ainsi une priorité à son objectif principal : la promotion des investissements au Togo. Elle doit être une véritable structure de promotion des investissements et non un simple « guichet unique » des formalités administratives ni une simple structure d’administration de la Zone Franche. C’est bien l’objectif accessoire qui doit suivre le principal et non le contraire.
 
L’API-ZF doit aller au-delà des simples formalités administratives et se lancer dans une véritable démarche tripartite afin d’assurer une bonne promotion des investissements au Togo. Elle doit à cet effet :
  • assurer une bonne étude du marché préalable à la présentation de l’environnement des affaires au Togo ;  
  • assurer la création effective d’un bureau de représentation à l’étranger ;  
  • disposer d’une bonne stratégie de communication : le digital doit être au cœur des politiques de l’API-ZF. Elle doit disposer d’un site web complet, efficace, doté de plusieurs sections avec des mises à jour très régulières ; à travers ce site, l’API-ZF doit relayer régulièrement les opportunités d’investissement au Togo, les raisons pour lesquelles il faut investir au Togo, le climat des affaires au Togo, les appels à manifestations...
Nous devons aussi relever que la mise en place de l’API-ZF sur le territoire togolais n’est pas encore effective. La mise en place effective de l’API-ZF entraînera l’abrogation des dispositions de la loi de 2011 portant statut de la Zone franche qui sont contraires aux dispositions touchant audit statut figurant dans le nouveau Code des investissements. [11]
 
Nous espérons que tous les acteurs impliqués dans ce processus s’activeront afin de permettre à cette belle structure d’atteindre les objectifs qui lui ont été assignés.
 
[1] Le CIRDI est l’instance de résolutions des différents relatifs aux investissements par les modes de résolution alternatifs que sont principalement l’arbitrage puis la médiation et la conciliation mettant aux prises les parties dont l’un au moins est un État et initié par l’ONU à la suite de la signature des accords de Marrakech.
[2] Article 2.3 du Code Nigérien des Investissements « Un investissement est un capital employé par toute personne physique ou morale pour l’acquisition de biens mobiliers ou immobilier, matériels et immatériels et pour assurer le financement des frais de matières premières (…) » ; Article 1. 4 du Code sénégalais des investissements ; Article 1 du Code ivoirien des investissements…
[3] JCl. Droit international, fasc. 572-42, 572-50, 572-55, 572-60, 572-65 et 572-70, p. 8.
[4] Nanteuil (de) A., L’expropriation indirecte en droit international de l’investissement, Paris, éd. Pédone, 2014, p. 359
[5] Théoriquement pour l’instant.
[6] Société d’Administration de la zone franche. La zone franche est régie par la nouvelle loi n° 2011-018 du 24 juin 2011 portant statut de zone franche industrielle.  Monsieur Maurice POTCHO est l’actuel Directeur du « Guichet Unique » et des relations publiques de la SAZOF.
[7] Forbes magazine, 11 janv. 2017, www.forbes.fr, Que valent les agences africaines pour la promotion des investissements ; voir aussi www.lepoint.fr, 23 avr. 2018, Industrialisation en Afrique : ces si utiles agences de promotion des investissements.
[8] www.lepoint.fr supra.
[9] Banque mondiale,  Rapport Doing Business 2019
[10] Forbes magazine, 11 janv. 2017, www.forbes.fr, Que valent les agences africaines pour la promotion des investissements ; v. aussi www.afrik.com, 27 juill. 2015, Bilan mitigé des agences de promotion des investissements privés en Afrique-Subsaharienne
[11] Code des investissements Togolais, art. 55, nouveau
Source : Actualités du droit