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« Période de transition » et Brexit (conférence à la SITL 2018)

Transport - Douane
21/03/2018
La sortie de l’UE du Royaume-Uni fait l’objet d’une conférence à la SITL 2018 : l’accord politique du 19 mars 2018 sur la « période de transition » n’empêche pas les inquiétudes des professionnels du transport et de la logistique.
Hasard du calendrier, la conférence « Brexit : où en sommes-nous ? quels impacts sur votre business, sur votre supply chain ? » de la SITL 2018 se tient le 20 mars 2018, soit le lendemain de l’annonce par Michel Barnier, le Commissaire européen en charge du Brexit, d’un accord politique sur une large partie du futur accord international pour le retrait ordonné du Royaume-Uni, et notamment la période de transition. Selon cet accord politique, qui doit encore se traduire sous une forme juridique et donner lieu à une ratification par les deux parties, la période de transition débutera à la date de sortie de Royaume-Uni de l’UE, soit le 29 mars 2019, pour se finir le 31 décembre 2020.
 
Quelle « période de transition » ?
 
Hugues de Franclieu, Chef du bureau de la politique commerciale et du soutien à l'export à la Direction générale des entreprises (DGE), en charge notamment du Brexit, fait donc un point « à chaud » sur l’événement. Il rappelle les trois sujets importants. Celui des personnes sur lequel un accord est déjà intervenu. Celui du règlement financier (le budget de l’Union ne doit pas être déstabilisé et le Royaume-Uni doit régler un « solde de tout compte »). Et enfin celui de la période de transition. Jusqu’à la fin de cette période, on a un accord sur la continuité de l’existant du Marché intérieur : la transition est donc un statu quo. Les marchandises (françaises ou anglaises) circuleront librement. La Grande-Bretagne sera soumise durant cette période aux règlements de l’UE et devra transposer ses directives (en revanche, elle ne sera plus représentée au sein des institutions de l’UE). Durant la période, les droits et obligations issus des accords internationaux sont maintenus pour le Royaume-Uni, mais il y aura une possibilité de de négociation au cas par cas, sur autorisation de la Commission, sous réserve d’une duplication des accords existants (comme par exemple l’accord avec le Canada, ou CETA).
 
La proximité dans le temps de la fin de la période de transition (le 31 décembre 2020) constitue, selon Hugues de Franclieu, un moyen de pression de l’UE sur le RU, mais aussi un moyen d’éviter une « sortie sèche » (Hard Brexit) et donc de permettre une adaptation pour les relations futures. Il rappelle encore que « le risque de sortie sèche n’est pas absent » (la question de la gouvernance de l’accord de retrait et celle de la frontière irlandaise ne sont pas réglée) et qu’il faut s’y préparer aussi en entreprise. Plusieurs questions peuvent se poser : celle de l’absorption ou répercussion des droits de douane s’ils sont rétablis ; celle de la réduction des flux import/export ; celle de l’impact sur la logistique, avec les contrôles douaniers, les circuits d’approvisionnement, les délais, les coûts, etc.

Les inconnues du Brexit, sources d’inquiétude des logisticiens
 
Pauline Bastidon, de la Freight Transport Association (FTA) Royaume-Uni, qui représente tous les acteurs de la logistique en Grande-Bretagne, rappelle que les chaines logistiques sont « très intégrées » et liste des risques du Brexit qui vont notamment compromettre la fluidité des flux après la période de transition : des restrictions à l’importation dans le Royaume-Uni des produits frais et des points d’entrée dédiés pour eux ; des contrôles douaniers (sécurité/sûreté, phytosanitaire, alimentaire, etc., qui peuvent mener à des analyses en laboratoire) ; le trafic des véhicules qui connaîtrait des perturbations (même sans visibilité exacte sur les délais, l’embouteillage se chiffrerait en dizaines d’heure et deviendrait la norme selon la représentante de la FTA) ; l’insuffisance en termes de personnel, que ce soit pour les commissionnaires en douane ou les autorités publiques ; l’incertitude sur la capacité du système informatique douanier anglais à absorber le nombre des déclarations en douane ; les numéro EORI à demander ; l’inconnu sur la nomenclature des produits qui sera utilisée en Grande-Bretagne… Mais le « pire », souligne Pauline Bastidon, concernera le transport, cet « oublié des discussions » (la licence communautaire ne serait plus valide, les certificats de capacité ne seraient plus reconnus, etc.).
 
Les solutions doivent être trouvées par les négociateurs et par les entreprises pour préserver la fluidité mais surtout le transport, en s’assurant que chaque camion et chauffeur puissent passer. Theresa May s’est opposée à la solution d’une Union douanière mais il resterait encore la Convention de transit commun. Toujours au titre des solutions, Pauline Bastidon fait feu de tout bois et envisage aussi la reconnaissance mutuelle des OEA, un accord du type de celui existant avec la Suisse, une « single window » pour les contrôles, des ressources douanières adaptées en personnel, des contrôles sanitaires en amont sur les lieux de production, la reconnaissance des permis, etc.
 
Guylain Landais, Directeur des transports du même nom, s’inquiète de ce que la communication des « règles du jeu » ait lieu à la dernière minute : si la période est certes dédiée à l’élaboration de ces règles, il faudrait surtout qu’elle soit l’occasion de leur mise en œuvre.
 
Olivier Thouard, responsable douane de GEFCO France, rappelle également que le Brexit implique que la déclaration en douane remplace la déclaration Intrastat (DEB en France) pour les échanges entre le Royaume-Uni et l’UE. L’augmentation du nombre de ces déclarations en douane devra être absorbé par du personnel (celui-ci étant actuellement insuffisant, un travail avec les écoles doit être fait). Il ajoute que les contrôles douaniers feront s’arrêter les camions et qu’il faudra anticiper au maximum, ou se poser la question du lieu du dédouanent (en entreprise ou chez des prestataires par exemple).
 
Plus d’information sur ce sujet dans Le Lamy guide des procédures douanières.
Source : Actualités du droit